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actualité jurisprudentielle 2016 sur les Honoraires

DEUX ARRETS MAJEURS DE L'ANNEE 2016 EN LA MATIERE

 

CASSATION CIVILE 14/01/2016 N°15-10130 

La Cour de Cassation pose, dans cette décision, le principe selon lequel l'absence de convention d'honoraires, dans un domaine d'intervention dans lequel elle était pourtant obligatoire avant la loi du 6 août 2015 (client bénéficiaire d'une assurance de protection juridique), ne prive pas l'avocat de son droit à rémunération. Le juge d'appel, dont l'analyse est désavouée, avait pour sa part jugé qu'à défaut de convention d'honoraires, l'avocat ne pouvait prétendre à aucune rémunération complémentaire par rapport au barème de la compagnie d'assurances. Cette jurisprudence de la Cour Suprême était attendue particulièrement au regard de la généralisation du caractère obligatoire de la convention d'honoraires. Il est toutefois probable, en pratique, que le juge de l'honoraire appréciera avec plus de rigueur le montant de l'honoraire si l'avocat s'est affranchi de son obligation légale et déontologique de proposer une convention d'honoraires à son client.

 

CASSATION CIVILE 04/02/2016 N° 14-20960

La question du dessaisissement de l'avocat avant la fin de sa mission traverse régulièrement le droit de l'honoraire. Certaines décisions jugeaient caduque la convention d'honoraires en vertu du principe selon lequel la résiliation unilatérale d'une convention avant son terme prive celle-ci de tout effet. Le montant de l'honoraire était dès lors fixé, non pas suivant la convention, mais en application des critères de l'article 10 de la loi di 31 décembre 1971.

L'arrêt du 4 février 2016, abondamment commenté, clarifie les choses. En premier lieu, le calcul de l'honoraire de diligences demeure soumis à la convention d'honoraires même en cas de dessaisissement de l'avocat avant l'achèvement de sa mission. Ainsi, si un taux horaire a été stipulé dans la convention, c'est au regard de ce taux horaire et des fiches de diligences qui seront produites, que le juge de l'honoraire fixera le montant de l'honoraire. Rappelons toutefois que l'existence d'une convention ne prive pas le juge du pouvoir de réduire l'honoraire exagéré.

 

Pour l'honoraire de résultat, la situation est plus complexe. Le juge, dit la Cour de Cassation, doit vérifier, à la date à laquelle il statue, si une décision irrévocable permettant d'allouer l'honoraire de résultat est intervenue. En l'espèce, il était prévu un honoraire de résultat proportionnel aux sommes obtenues par la cliente dans le cadre d'une procédure de divorce…

Cette décision, saluée par la plupart des auteurs, suscite pourtant une vraie perplexité. Il faudra en effet s'assurer de la production devant le juge de l'honoraire de cette décision " irrévocable ". Or seul l'avocat dessaisi aura intérêt à cette production…Parviendra-t-il à l'obtenir de son ancien client, de son confrère qui lui a succédé…rien n'est moins sûr. Deuxième difficulté : l'honoraire de résultat n'est dû que si le résultat a été " obtenu ", ce qui signifie que les fonds ont été effectivement perçus par le client. Là encore, cette preuve ne sera pas facile à apporter pour un avocat qui n'est plus dans le dossier...

Enfin et surtout, le juge devra déterminer si le résultat est exclusivement lié à la prestation accomplie par l'avocat dessaisi ou si l'avocat qui lui a succédé a participé à l'obtention de ce résultat. Dans ce cas, on s'orienterait vers une répartition de l'honoraire de résultat entre les deux avocats avec néanmoins la difficulté que le second avocat n'est pas partie à la procédure de contestation d'honoraires…

En conclusion, si cette clarification jurisprudentielle en matière de dessaisissement de l'avocat est bien venue pour l'honoraire de diligences, elle soulève beaucoup d'interrogations pour l'honoraire de résultat.

 

LES POUVOIRS DU JUGE DE L'HONORAIRE

Le juge de l'honoraire est compétent pour statuer sur la question d'un vice de consentement affectant la convention sans qu'il soit besoin de saisir le juge de droit commun ( Cassation civile 04/02/2016 N°14-23960).

En revanche, le juge de l'honoraire n'est pas compétent pour se prononcer sur la validité de la convention, par exemple un mandat d'agent sportif ( Cassation civile 14/01/2016 N°14-26846).

Le juge de l'honoraire peut prendre en considération le caractère utile ou non des diligences de l'avocat et ce indépendamment de la notion de responsabilité de l'avocat ; en l'occurrence l'avocat avait introduit une action en référé alors que le juge du fond l'inutilité de cette diligence. (Cassation civile 14/01/2016 N°14-10787)

 

LA PROCEDURE

Le caractère oral de la procédure est rappelé à nouveau Il n'est pas obligatoire dans ces conditions que les conclusions soient datées. A défaut de mention particulière, elles porteront la date de l'audience. ( Cassation civile 04/02/2016 N°14-23960)

En présence d'une note en délibéré, le juge doit s'assurer avant de statuer si cette note a bien été diffusée à l'ensemble des parties. ( Cassation civile 24/03/2016 N° 15-10171)

Le délai imparti au Bâtonnier pour se prononcer est de quatre mois et non pas trois mois comme indiqué par erreur par un Premier Président. Dès lors, à défaut d'ordonnance du Bâtonnier, le Premier Président peut valablement être saisi au plus tard cinq mois après la saisine du Bâtonnier si l'on tient compte du délai d'appel de un mois. ( Cassation civile 03/03/2016 N°14-29037)

  

LA NOTION DE CONSOMMATEUR

 

On sait depuis deux arrêts du 26 mars 2015 que la prescription biennale de l'article L137-2 du Code de la consommation s'applique à l'action en fixation d'honoraires initiée par l'avocat contre son client consommateur.

Selon la définition issue de la loi HAMON du 17 mars 2014, doit être qualifiée de consommateur "  une personne physique ayant eu recours aux services d'un prestataire à des fins n'entrant pas dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale… ".

En l'espèce, un gérant associé unique d'une EURL signe deux conventions d'honoraires distinctes avec un cabinet d'avocats dans le cadre de deux dossiers successifs d'achat de parts dans lesquels il recherchait un objectif de défiscalisation.

La première convention est signée par l'EURL représentée par son gérant. Pour la Cour de Cassation, même si l'objectif recherché était attaché à la personne du dirigeant, cette convention n'est pas soumise à la prescription biennale puisqu'elle engage une personne morale.

La seconde convention est conclue par le gérant sans référence à la personne morale dont il est représentant légal. Le juge d'appel a considéré que la prescription biennale était applicable s'agissant d'une personne physique. Cette analyse est censurée par la Cour de Cassation car il appartenait au juge du fond de rechercher " à quelles fins Mr X…avait eu recours au service de l'avocat ", autrement dit à des fins personnelles ou bien à des fins entrant dans le cadre d'une activité commerciale. (Cour de Cassation 14/01/2016 N°14-26943)

 

Jean-Pierre DEPASSE

 

 

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