Lors de l’achat d’un ordinateur, celui-ci est quasiment systématiquement livré avec un ensemble de logiciels pré-installés (système d’exploitation, suite bureautique, anti-virus, etc). Cette solution, appelée « vente liée » permet d’avoir un ordinateur immédiatement prêt à l’emploi.
Avantageuse au premier abord, cette pratique ne permet pas de distinguer la ventilation du prix du matériel et du logiciel, ni d’acquérir un ordinateur « nu » ou avec d’autres logiciels pré-installés.
Plusieurs recours ont été introduits contre vendeurs et fabricants sur le fondement de la « pratique commerciale trompeuse », c’est-à-dire qu’il était reproché à ces derniers d’omettre, dissimuler ou rendre incompréhensible une information substantielle sur le bien vendu.
Après diverses jurisprudences contradictoires, la Cour de cassation a initialement posé comme principe qu’une telle vente n’était licite que si consommateur pouvait avoir la possibilité de se procurer un ordinateur « nu » identique auprès du vendeur (Cass. 1e civ. 12 juillet 2012, pourvoi n° 11-18 807, Cass, 1ère civ, 5 février 2014, pourvoi n°12-25 748).
La Cour de Justice de l’Union Européenne, saisie par l’intermédiaire de la question préjudicielle, a estimé que « l’absence d’indication du prix de chacun de ces logiciels n’est ni de nature à empêcher le consommateur de prendre une décision commerciale en connaissance de cause ni susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement » (CJUE, 7 septembre 2016, arrêt C 310/15 CJUE).
Cette jurisprudence pose le principe que la vente liée de matériel et de logiciels informatiques n’est pas, en soit, une pratique déloyale.
Ainsi, à l’occasion d’un récent arrêt (Cass. 29 mars 2017, 1ère civ, pourvoi n°15-13248), la Cour de cassation aligne sa jurisprudence sur celle de la CJUE.
Elle vient également préciser que « la pratique commerciale litigieuse ne présentait pas un caractère déloyal, dès lors que les ordinateurs non équipés de logiciels préinstallés ne faisant pas l’objet d’une demande significative de clientèle, exception faite de celle, marginale, constitué par des amateurs éclairés qui souhaitaient bénéficier à la fois des prix attractifs de la grande distribution et de produits non standardisés ».
La saga jurisprudentielle semble donc prendre fin… sauf à ce que l’exception posée par la notion de « demande significative de clientèle » autorise de nouveaux rebondissements.
Jean-Pierre DEPASSE Arnaud FOUQUAUT